Sommaire
A propos
Fondé à Paris en 2012 par Wladimir de Lantivy, Paul Emilieu Marchesseau et Johnny Rabines, DANT est un groupe qui, à travers les transformations sociales engendrées par la technique, questionne des thématiques inhérentes aux secteurs de l'architecture et du design. Ainsi, DANT souhaite sonder, concevoir et refaçonner les interactions qui lient ces deux disciplines à des enjeux contemporains.
Notre travail se situe à la croisée d'un large écosystème de compétences théoriques et pratiques. Privilégiant des dialogues inter-disciplinaires entre théoriciens et praticiens par le biais de conférences et d'articles, notre groupe, vise à devenir à la fois une force de réflexion et de proposition.
DANT est intégré à l'équipe de recherche CNRS Art & Flux, se compose de designers, sociologues, linguistes et d'enseignant.
Axes de recherches
Environnement d'apprentissage
Avons-nous réellement besoin de lieux dédiés à la transmission de savoirs? L'époque que nous vivons a vu naître un accès, parfois relatif, à l'information. Séduisante, omniprésente, augmentée, celle-ci ne représente plus une fin en soi. Le traitement qu'on lui accorde rélève du détachement de celui qui observe un flux. Mais au-delà des interrogations sur la nature des contenus à transmettre, il nous semble essentiel de comprendre le rôle qu'assume l'espace dans les processus d'apprentissage émergents : classifier leur diversité, définir leurs limites, imaginer leurs formes futures, questionner leur intérêt, connecter leur activité avec de nouveaux secteurs.
Pour DANT, s’intéresser aux rapports qu’entretiendront les générations futures avec la connaissance s’avère être une chose fondamentale. A l’heure même où notre planète s’épuise géologiquement et symboliquement, contribuer à l’évolution de notre système éducatif représente depuis des années un engagement éthique et un vecteur de remise en question du rôle de l’architecte et du designer dans nos sociétés. L’héritage de l’architecture scolaire compte aujourd’hui nombre de constructions en crise, en cela qu’elle n’accompagne pas nécessairement l’évolution des modes de transmission du savoir. Aujourd’hui, nous pensons que ces établissements publics ne peuvent plus se permettre d’être datés ou rattachés à des mouvements ou des modes pédagogiques uniques et statiques. Si l’on tente effectivement de «concevoir l’école en réseau dans son territoire», l’environnement qu’on lui associe devra forcément être ouvert à la formation d’une «nouvelle alliance éducative»(1). Ouvert? Nous évoquons l’idée de les ouvrir physiquement, de les ouvrir à de nouveaux écosystèmes, à de nouvelles disciplines d’études, à des évolutions organisationnelles dynamiques, à d’autres modes de gouvernance, à une nouvelle maïeutique, etc.
Les technologies numériques rendent possible un bouleversement de ces milieux. Loin de la technophobie, nous croyons qu’elles peuvent présenter des situations de leurre voir de réels dangers – standardisation des contenus et des supports, surveillance à outrance, formatage de la pensée, prolétarisation des esprits, vitesse d'innovation supérieure à celle du renouvellement des générations et coût d'actualisation du matériel trop élevé. Nous ne souhaitons pas que ces environnements d’apprentissage deviennent à leur tour des lieux de consommation et prônons l’existence d’environnements en mesure d'accompagner l'expression et l'assimilation d'une littératie numérique.
Beaucoup de parallèles existent entre le monde de l'éducation et celui de la conception en design et en architecture, par exemple, lorsqu'un enseignant construit un scénario rendant possible la transmission de savoirs. A ce titre, il doit tenir compte des paramètres qui composeront l’expérience (utilisateur)(2) qu’il proposera à son auditoire. Quels supports d’information va-t-il choisir? Quelles articulations définiront l’ergonomie de son propos ? Quelle posture corporelle va-t-il adopter ? Quelle configuration spatiale correspondra à son objectif pédagogique? En bref, dans quel scénario va-t-il ancrer sa proposition éducative? Bien sûr, des questionnements similaires peuvent placer la caméra du côté d'un autre membre de la commuauté éducative, de l’apprenant ou de tout autre usager de ces lieux. La complexité de cette thématique permet à notre équipe et à nos contributeurs de régler la focale sur l'un ou l'autre de ces points de vue.
Imaginaires en résistance
"Nous imaginons le plus claire de notre temps, si nous admettons qu'imaginer n'est pas seulement inventer des fictions, mais produire des images mentales en lieu et place de données qui n’existent plus ou pas encore, en confiant aux images et à leurs valences affectives le pouvoir de lier entre eux les moments de notre vie, de remplir les vides de l'ignorance, de susciter des valeurs et des croyances négatives ou positives relatives à la vie que nous menons". (1)
On comprend que l'imaginaire échappe à l'automatisation généralisée de nos sociétés. Ce qui nous différencie aujourd'hui des machines ou encore de l’intelligence artificielle, c'est principalement cet imaginaire à la fois rationnel et irrationnel qui agit en colonne vertébrale de nos émotions et de nos affects. Notre capacité à produire des imaginaires est souvent liée à notre éducation, à nos lectures, au cinéma, aux jeux vidéo et à tous moyens de produire des images symboliques suscitant en chacun une multiplicité d'imaginaires. De nos jours, on constate en occident une saturation d'images produites et industrialisées, autant par la science fiction, la publicité, les magazines et autres médias, qui agit comme des œillères pour nos imaginaires.
Dans un monde numérisé criblé de représentations techniques, les technologies solutionnistes prennent une part belle dans la construction d'un futur rationnel à l'impact environnemental inquiétant. Dans ce contexte d'épuisement des ressources, terrestres et imaginaires, il est indispensable de réfléchir à cette "matière première"(2) capable de désinhiber afin de nourrir et produire des alternatives réenchantées.
Dans ce cadre, comme pour résister au dogmatisme de cette "industrie des imaginaires"(3), à ce futur sans utopie, de nouvelles pratiques s'inventent. Au centre l’atmosphère, l'espace, les objets et les artefacts techniques sont autant d’éléments qui cristallisent les imaginaires aussi bien qu'ils s’emploient en instrument.
Sans rentrer dans les détails de ces pratiques, on retrouve certains de ces phénomènes dans les festivals, les ZAD (zones à défendre) ou autres zones temporaires de résistance et de liberté par la capacité à fédérer des imaginaires à travers leurs environnements. Nous pouvons également évoquer les constructions de processus tels que le "design fiction"(4) ou les "fictions situées"(5) qui forment un congloméra que l'on pourrait qualifier de "design et architecture des imaginaires". Design quand il concerne le processus de modélisation et de projection, et architecture lorsqu'il évoque l'agencement ou la structuration. Alors comment désinhiber les imaginaires ? Comment fédérer et réenchanter par les imaginaires ? Comment inventer des dispositifs propice aux imaginaires ?